Krugman s'attaque au programme de Marine: est-ce sérieux



Même un ‘Nobel’ libéral-libertaire, donc bien-pensant, attaque le programme de Marine. Est-ce sérieux ?
Par Bruno Lemaire, économiste, diplômé d’Harvard, de Paris VII et de Paris XIII.

Répondons point par point à cette dépêche de Reuters, reprise par Boursorama. (Si même les mondialistes demandent un coup de main d'un 'Nobel' américain, c'est peut être que l'on tient le bon bout, non?)

PARIS, 12 avril (Reuters) - Rien de ce que propose Marine Le Pen ne conduirait la France dans la bonne direction, écrit le prix Nobel d'économie Paul Krugman, à un peu plus d'une semaine du premier tour de l'élection présidentielle française, jugeant
que sortir de l'euro et de l'Union européenne pénaliserait durement le pays.

P.K."Le coût de la sortie de l'euro et de la réintroduction d'une monnaie nationale serait immense"
B.L. Nous avons déjà montré que cette affirmation était fallacieuse, et nombre d’économistes reconnus de la place de Paris, dont les professeurs Jacques Sapir, Rosa, Lafay l’ont aussi fait de leur côté, avec talent.
Sans s’étendre ici sur notre argumentation, rappelons seulement que le fait de revenir à une monnaie adaptée, un euro français déprécié de 21% par rapport à un euro germanique [ et de 5 à 6% seulement relativement à un panier de monnaies internationales, dont le dollar ] nous ferait sans doute gagner 100 points (1%) de PIB, et transformerait notre déficit de plus de 20 milliards vis-à-vis de l’Allemagne en un excédent de même montant, sinon plus élevé.

P.K."Une fuite massive des capitaux provoquerait une crise bancaire, des contrôles des capitaux et des fermetures temporaires des banques devraient être imposées, des problèmes de valorisation des contrats créeraient un bourbier juridique,les entreprises seraient perturbées pendant une longue période de confusion et d'incertitude"
    Alors que le candidat de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, prévoit la mise en place d'un contrôle des capitaux pour accompagner une sortie de l'euro, ce qui empêcherait les Français de transférer leurs euros vers une banque à l'étranger,l'équipe de la candidate du Front national estime qu'une telle mesure ne serait pas nécessaire.

B.L. Sur les difficultés juridiques, tout changement de contrat en soulève, mais on ne voit pas trop pourquoi ces difficultés seraient spécialement importantes, sachant que la jurisprudence de 1997 sur la « lex monetae » s’appliquera, et donc que la redénomination d’un euro en un euro français, ou en franc 2017, ne posera aucune difficulté juridique, ni technique (avec une parité de 1 pour 1, les systèmes informatiques pourront être mis à jour en quelques heures)
Sur le contrôle des capitaux, ce point est sans doute à discuter, puisque le contrôle des capitaux a existé dans le passé, sans pour cela que la France ne soit transformé en Corée du Nord. Il faut aussi distinguer les capitaux spéculatifs (« hot money ») et les capitaux destinés à être investis, donc à moyen long terme.
Depuis Keynes, on est moins clivant qu’à son époque, car il faut distinguer différents mouvements de capitaux, et même le FMI a récemment déclaré que le contrôle des capitaux pouvait être une bonne chose, dans certains contextes. C’est aussi ce que disent Jacques Sapir ou Benjamin Cohen

P.K." S'infliger une telle potion amère aurait pu se concevoir pour la Grèce mais pas pour la France qui n'est absolument pas dans la même situation économique"
B.L. Effectivement, la France n’est pas dans la même situation que la Grèce, c’est justement pour cela que notre volonté politique, négociation avant une sortie éventuelle, est beaucoup plus crédible. En ce qui concerne la Grèce, on peut constater que le fait de rester dans l’eurozone ne lui a hélas pas porté chance.

P.K."Pour la France, sortir de l'euro entraînerait tous les coûts que la Grèce aurait eu à supporter sans aucun des bénéfices"
B.L. affirmation là encore ‘gratuite’, que nous avons déjà démontée

P.K.Quant à la sortie de l'Union européenne, "désolé, mais la France n'est pas assez grande pour prospérer avec des politiques économiques centrées sur elle-même, nationalistes".
B.L. Les exemples de la Suisse ou de la Corée du Sud [Pour ne pas parler du Royaume Uni] montrent que ce n’est pas une question de taille, mais de puissance industrielle, de formation, de volonté, d’imagination créatrice. Krugman montre ici toute son arrogance, celle d’être américain, vis-à-vis des « petits pays » et de penser que seuls les Etats-Unis devraient avoir leur mot à dire. De plus il ne s’agit nullement, pour la France, de se refermer sur elle-même – pas plus que la Suisse - mais d’avoir un protectionnisme intelligent, avec des écluses commerciales équilibrant les échanges commerciaux.

P.K."Rien de ce que le FN a à offrir ne conduirait la France dans la bonne direction", poursuit l'économiste.
B.L. En guise de conclusion, beaucoup de « blabla », on pouvait attendre mieux d’un « Nobel », et d’une revue qui se veut sérieuse comme Boursorama qui a repris le communiqué de Reuters. On est bien loin d’un débat argumenté. Seul le point sur le contrôle des capitaux pourrait être retenu comme relativement sérieux.

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