PourUneRenaissanceDuFranc


Les conséquences d’une renaissance du franc : mythes, fantasmes et réalités …

Quelques réponses aux questions que se posent légitiment les français, par Bruno Lemaire, professeur émérite HEC, conseiller économique de Marine Le Pen.

Q. La sortie de l’Euro est-elle inévitable, et quelles en seraient dans ce cas les modalités ?

Inévitable, peut-être pas. Ce qui est sûr, c’est que l’Euro est sous perfusion, et que l’Eurozone ne subsiste que grâce aux petites et grandes manœuvres de la BCE, un ancien de la banque Goldman Sachs à sa tête.

De fait, il n’y a que 3 scénarios possibles, en dehors d’un statu quo qui ne peut que continuer à affaiblir la majorité des pays et des peuples de cette eurozone.

Q. Lesquels ?

Le scénario 1, celui recommandé par Marine Le Pen, serait une sortie coordonnée de l’Euro, qui se concrétiserait par la renaissance des monnaies nationales dans chacun des 18 pays de l’Eurozone, un franc nouveau, une peseta nouvelle, une lire nouvelle, etc.

Le scénario 2, plus brutal, serait l’éclatement de la zone euro en 2 zones monétaires, l’eurozone « germaine »  et l’eurozone « latine »

Le scénario 3, encore plus brutal – mais qui n’est pas le moins plausible si l’on continue à nier les problèmes soulevés par l’existence même de l’Euro – c’est l’explosion de l’Euro, ce qu’avaient d’ailleurs envisagée, fin 2011, Jacques Attali et même Jacques Sapir.

Ce serait sans doute la pire situation pour l’Allemagne, alors que la France aurait dans les 3 cas un surcroît annuel de croissance supérieur à 2%, voire davantage, cette croissance étant d’autant plus forte que la dépréciation du franc nouveau par rapport au niveau actuel de l’euro serait importante.

Q. Et quel serait ce niveau ‘optimal’ pour la dépréciation du franc nouveau?

Les valeurs envisagées par les experts du Front National varient entre 10 et 20% de dépréciation (soit un niveau compris entre 1.05 et 1.20 contre dollar.

Q. Très proches, en fait, du niveau initial de l’Euro, qui valait 1.17 dollar.

Tout à fait. En fait, 10% de dépréciation correspondrait au niveau d’équilibre envisagé par le cabinet Nomura, fin 2011, et 20% à ce que suggérent les économistes réputés à gauche, J. Sapir et P. Murer.

Q. Pouvez-vous préciser à quoi servirait cette dépréciation ?

L’économie, si elle n’est peut-être pas une science aussi « respectable » - ni respectée – que les mathématiques, la physique, la chimie – des sciences dures – dispose quand même de quelques lois validées par l’expérience. L’une de ces lois – du simple bon sens pourrait-on dire – c’est qu’une dépréciation renchérit les importations, et rend les exportations plus attractives.

Il s’agit donc, si l’on retrouve notre souveraineté monétaire, ce qui ne peut se faire qu’avec la renaissance d’un franc nouveau, et donc la disparition de l’euro en tant que monnaie unique, de fixer le bon niveau de cette dépréciation pour obtenir la réduction de notre solde commercial, afin que la valeur globale des biens et services exportés compense exactement la valeur des biens et des services importés.

Q. La valeur du franc nouveau devrait donc être telle que le déficit commercial de la France soit réduit à zéro, au lieu d’être actuellement de plus de 60 milliards ?

Oui, c’est tout à fait cela.

Q.  Mais on nous dit pourtant que si le franc nouveau était moins cher par rapport au dollar, le prix des importations de pétrole augmenterait …

C’est vrai, le prix unitaire du baril augmenterait, du moins la partie hors taxe, qui ne correspond en fait – brut plus raffinage - qu’à 36% du coût à la pompe pour l’essence, et à 45% pour le gas oil. On estime cependant que la quantité consommée diminuerait, du fait de ce que l’on appelle l’effet prix, qui varie de produit en produit, et de secteur en secteur, et que d’autres sources d’énergie alternatives pourraient être recherchées, un peu comme ce qui s’était passé en 1973/1974, lors du premier choc pétrolier.

Plus généralement, en tenant compte de cet effet-prix, à la fois sur les importations et exportations, on retrouve le fait que pour équilibrer nos échanges, une dépréciation du « Franc nouveau » de l’ordre de 10 à 20% par rapport au niveau actuel de l’euro contre dollar permettrait de rééquilibrer nos échanges de biens et services puisque, dans le même temps, le mark nouveau serait lui apprécié d’environ le même pourcentage.

Q. 20%, c’est quand même beaucoup, non ?

En fait, lorsque Pinay a été amené aux affaire par de Gaulle, le franc a été déprécié par rapport au dollar de 35%, même si cette dépréciation est passée inaperçue du fait que nous sommes passés simultanément au nouveau franc, dit encore franc Pinay, dépréciation qui a d’ailleurs permis une forte croissance pendant les années qui ont suivi.

Q. Je veux bien croire que cette dépréciation va permettre à la compétitivité française d’être restaurée, et d’atteindre à nouveau l’équilibre entre nos exportations et nos importations …

Equilibre que nous avions eu entre 1992 et 2002, et même plus, puisque nous étions même exportateurs nets tout au cours de cette période.

Q. En fait, ce que je veux dire, c’est que va devenir notre épargne. Elle est actuellement libellée en euros, non ?

Oui, et que ce soit libellé en euros ou en francs nouveaux n’a pas beaucoup d’importance, au moins pour les épargnants qui vivent en France, ou qui comptent investir et dépenser en France. Mais le vrai problème de l’épargne n’est pas là.

Q. Que voulez-vous dire ?

Actuellement, l’épargne accumulée par nos compatriotes dans les banques ou compagnies d’assurance françaises est de l’ordre de 2000 milliards, dont plus de 1500 milliards correspondent à des épargnants modestes, ceux que l’on appelle des petits épargnants.

Q. Oui, et alors ?

Cette épargne est gagée sur la solidité de l’économie française, et en premier lieu, sur la solidité de nos banques. Si ces banques ont des problèmes, ce qui est le cas pour plusieurs d’entre elles, cette épargne est grandement menacée.

Q. Comment cela ? Je croyais que notre épargne était garantie à hauteur de 100 000 euros par compte …

Théoriquement, oui. Mais, en fait, le fonds de garantie est abondée de 2 milliards seulement. Alors, 2 milliards pour garantir 2000 milliards, ou même 1500 milliards, le calcul est vite fait. Ce n’est pas ce fonds de garantie qui peut garantir quoique ce soit. La seule garantie, ce serait d’avoir une économie solide, ce qui n’est pas le cas pour les « eurozonards » que nous sommes, d’où l’importance de sortir au plus vite de ce carcan de l’Euro, et de retrouver notre souveraineté monétaire, qui ne peut que s’appuyer sur une monnaie nationale, le franc nouveau.

Q. Pour le déficit commercial, je pense avoir compris, pour l’épargne d’accord aussi, mais pour toutes les dettes publiques que nous avons engrangées depuis 30 ou 40 ans, il faudra bien les payer un jour. Alors, avec une monnaie dépréciée, cela sera encore plus difficile, non ?

Dans le contexte actuel, vu que notre dette continue à croitre de plus de 80 milliards par an, ce qui donnera un montant de l’ordre de 2050 milliards de dettes publiques fin 2014, cette dette ne pourra pas être totalement remboursée avant un siècle ou deux, au mieux.

Q. Comment cela ?

Pour commencer à rembourser, il faut déjà que notre déficit soit réduit à zéro, et même que nous ayons un excédent budgétaire – ce qui ne s’est jamais produit depuis 40 ans. Mais même en supposant qu’à partir de 2017 on réussisse à faire mieux qu’équilibrer nos dépenses et nos recettes publiques, et à a engendrer ne fut ce que 10 milliards d’excédent annuels, il faudrait 2 siècles pour rembourser 2000 milliards. Autant dire que cela ne se fera pas ainsi, avec une croissance atone et une pression fiscale déjà à la limite du supportable.

Q. Et en quoi le passage à l’euro permettrait de faire mieux, surtout si le montant de cette dette est plus important, du fait de la dépréciation du franc nouveau ?

La dépréciation éventuelle du franc n’aura pas beaucoup d’impact, puisque cette dépréciation se fer tout d’abord en 2 étapes. La première se concrétisera dans un simple changement de nom de « notre » monnaie nationale », un franc pour un euro. Les 2000 milliards d’euros se transformeront ainsi en 2000 milliards de franc s nouveaux.

Q. Et ensuite…

97% de ces dettes sont libellés en droit « international », en fonction de la nationalité du débiteur ; dit autrement, ils sont remboursables en monnaie nationale, française dans le cas présent.

Seuls 3%, c’est-à-dire 60 milliards, devront être remboursés en euros (ou en équivalent dollar, si l’euro n’existe plus) Si cet euro – ou ce dollar -  prend, par la suite, 20% de valeur par rapport au franc, le passage à l’Euro aura coûté 10 ou 20% de ces 60 milliards, soit 6 à 12 milliards d’euros. On est donc loin des 200 ou 300 milliards évoqués par Nicolas Sarkozy ou François Hollande au cours de la campagne présidentielle de 2012.

En ce qui concerne le remboursement de l’ensemble de la dette, le passage à l’Euro n’aura pas d’effets miraculeux, certes, mais une économie plus forte, et une croissance retrouvée, ne peuvent que faire mieux que le statu quo, celui d’une eurozone en déliquescence.

Commentaires

  1. 15 mars 1944 : le programme du CNR.

    70 ans après, souvenons-nous…

    http://www.les-crises.fr/15-mars-1944-cnr/

    Admiration sans borne pour le programme du CNR, plus que jamais d’actualité.

    Nous savons ce qui va se passer tout au long du XXIème siècle.

    Nous savons quelles sont les quatre étapes que nous allons suivre tout au long du XXIème siècle :

    1- Effondrement.

    2- Ensuite, révolte.

    3- Ensuite, libération de la France.

    4- Ensuite, épuration.

    L’Histoire est un éternel recommencement.

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